En 2019, à l’initiative du CHU de Besançon, une expérimentation de suivi des plaies des pieds diabétiques a été mise en place avec l’appui de l’ARS et de deux autres centres experts : CH du Creusot et CHU de Dijon, ainsi que l’URPS infirmiers libéraux.
Son but est d’organiser le suivi des plaies du pied diabétique par télé expertise grâce à la coordination des diabétologues hospitaliers et infirmiers libéraux. Pour cela, une consultation hospitalière sur 2 est remplacée par une séance de télé expertise au domicile du patient. Les infirmier.ère.s diplômé.e.s d’état libéral (IDEL) assurent la description de l’état des plaies et la prise de photos lors des soins quotidiens. Elles transmettent les éléments au médecin via une application de télémédecine développée par le Groupement Régional d’Appui au Développement de la e-Santé (GRADeS) Bourgogne-Franche-Comté.
L’évaluation de cette expérimentation porte sur 3 dimensions : les conditions d’implantation, de mise en œuvre et les résultats obtenus. Des entretiens semi-directifs ont été réalisés auprès de l’équipe projet : chargés de mission de l’ARS, chargée de projet du GRADeS, équipes des services de diabétologie des centres experts, infirmiers et infirmières libérales participants. Les données d’activité de télé expertise et de coûts des soins, transmises par les médecins de chaque centre expert, ont été analysées.
À noter que la crise sanitaire liée à la Covid-19 a perturbé la mise en œuvre de cette expérimentation, de même que son évaluation, intervenue pour 2 centres experts sur 3, plus d’1 an après les dernières inclusions.
Parmi les principaux enseignements, le temps consacré par les équipes hospitalières à la prise de contact avec les IDEL pour leur proposer d’entrer dans l’expérimentation, qui n’avait pas été identifié lors de la conception du projet, s’est révélé particulièrement chronophage. La chargée de projets du GRADeS a assuré ce relais. Les médecins qui ont souhaité coupler la télé-expertise avec une téléconsultation auprès du patient mentionnent le temps supplémentaire que cela implique, et la nécessité de bien baliser le type de consultation pour éviter les oublis ou des conditions de téléconsultation défavorables. L’avis de télé expertise est globalement possible d’après les éléments transmis, mais il peut subsister un doute lié à la qualité des photos.
Le rôle confié aux IDEL dans le cadre de cette télé expertise leur apporte une reconnaissance de leur place dans le processus de soin. La plupart d’entre elles perçoivent une valorisation de leur expérience et savoirs concernant les plaies et les soins adaptés.
Les IDEL soulignent le renforcement, voire la mise en place d’une communication avec le diabétologue de leur patient, qui permet d’ajuster le protocole de soins en temps réel. Ce qui constitue un gain de temps pour tous, aboutissant à une amélioration de la prise en charge. Le mode asynchrone permet d’obtenir rapidement un appui du diabétologue en cas de besoin, si bien que malgré l’arrêt de l’expérimentation, certain.e.s IDEL ont maintenu cette habitude de transmettre des photos pour avis, mais via des canaux non sécurisés. Cette pratique pose des problèmes de sécurisation des données personnelles des patients et de l’intégration des données dans leurs dossiers. Elle démontre aussi tout l’intérêt du dispositif de télé expertise, qui offre un cadre de partage d’informations médicales sécurisé et normalisé, via le formulaire de description de la plaie.
Les difficultés techniques rencontrées sont pour certaines, liées à la qualité du réseau, qui compromet l’envoi des éléments nécessaires à la télé expertise. D’autres concernent l’application et appellent des améliorations, vérifications de certaines fonctionnalités, comme la confirmation de l’envoi des photos et de sa réception par le médecin.
Les patients interrogés (7), sont quasi-exclusivement préoccupés par la guérison de leur plaie. Les photos prises par l’IDEL sont intégrées dans leurs soins quotidiens. Ce qui invisibilise l’expérimentation, car la plupart n’en ont pas souvenir. Certains néanmoins soulignent l’importance de la relation de confiance et de proximité qu’ils ont avec l’IDEL, et la place qui peut leur être laissée (patient ou aidant) pour participer au soin.